Era Hada

Installation audiovisuelle comprenant deux vidéos, une série de sténopés, une création sonore et la mise en scène d'objets symboliques.

Date2021
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Era Hada est une installation audiovisuelle réalisée lors de ma résidence Chez Jeanne (Gerde – 65) en juillet 2021. Elle a été inspirée par l’archétype de la fée entre les hauteurs de Germs-sur-l’Oussouet et les abords de la Fontaine de Crastes.

L’élément principal de l’installation est une performance filmée. J’ai investi une zone pastorale à cheval entre ma vallée d’origine et celle de la résidence. Imprégnée par les énergies du lieu, j’ai improvisé une cérémonie pour rendre grâce à la montagne, en miroir du vol des vautours fauves. L’image de la fée, era hada en gascon, s’est immédiatement imposée.

Restitution de la résidence, Gerde (65) – 16/10/2021

J’ai commencé à m’intéresser aux hadas en 2018, lorsque j’ai découvert que la racine étymologique de ce mot signifiait à la fois fée et folle. Un conte populaire met en scène cette figure surnaturelle, venue vivre parmi les humains et célébrée pour sa beauté. Pourtant, lorsqu’elle fait appel à ses habilités magiques pour sauver une récolte, elle est instantanément rejetée par les habitants de sa maison et retourne vivre dans les bois.

Au cours de cette résidence, j’ai exploré d’autres supports pour représenter cet archétype. Aux alentours de la Fontaine de Crastes, j’ai enregistré les sons d’un paysage aquatique dans lequel s’épanouirait une fée des eaux, en lien avec les propriétés curatives de cette source, riche en symboles traditionnellement associés au féminin.

J’ai aussi photographié une silhouette évanescente avec un sténopé, un procédé qui crée des images impossibles : le temps de pose d’environ 15 secondes capture l’incarnation à deux endroits à la fois, dans un espace-temps qui n’a jamais existé en réalité. Un phénomène qui correspond tout à fait à la fée insaisissable.

Un sténopé illisible a donné lieu à des expérimentations. Le sujet trop éloigné ouvre à l’interprétation : qu’est-ce que je vois ? La fée, du végétal, un filet d’eau ? Comme dans le Blow-Up d’Antonioni, une succession d’agrandissements déforme l’image jusqu’à l’abstraction. L’imagination remplace la vue pour créer son propre mythe.

C’est tout l’objet de la deuxième vidéo de l’installation, diffusée sur un écran. La lumière d’une lampe-torche projette sur un mur le mirage de la fée, pour la chercher sans jamais tout à fait la trouver. Est-elle réellement présente, ou une fabrication de l’esprit ? Les nombreuses légendes où elle apparaît ne lui ont-elles pas fait prendre corps ? Tout n’est qu’affaire de perception.

English

Era Hada is an installation inspired by the Pyrenean archetype of the fairy: era hada in Gascon  dialect. I developed a strong interest for this archetype in 2018, when I discovered that hada means both fairy and crazy. A popular medieval tale portrays a fairy living among humans, celebrated for her enchanting beauty. But, as soon as she uses her supernatural abilities to save a crop, and the community she grew to love, she is rejected and forced to hide in the woods forever. Working with this archetype allows me to reclaim this feminine power, connected to the natural elements of the landscape : mountains, springs, trees, rocks.

The main element of the installation is a ceremonial performance, improvised on location to give thanks to the mountain, mirroring the flight of griffon vultures. I’ve chosen to project it onto bed sheets my grandmother passed on to me, like legends were passed on orally from a generation of women to another. Then, next to a spring known for its healing properties, I recorded an aquatic soundscape where a fairy would thrive. Again, in the Pyrenees, medicinal activities related to nature were traditionally assigned to women only. I also used pinhole photography to capture this archetype: long exposure creates an impossible space-time where the fairy is at two places at once, both veiled and naked, like in the ancient tales. 

An illegible shot makes us wonder: what am I looking at? The fairy, some plant, water? Like in Antonioni’s Blow-Up, successive enlargements deform the image to the point of abstraction. Imagination replaces our sense of sight to create its own myth. I tried to explore this idea further with the second video of the installation. Flashlight projects on the wall the fairy’s mirage, looking for her without ever properly finding the proof of her existence. Is the fairy a tangible presence, or a mere construct? Maybe the legend told for centuries materialized her in some  way. It is all a matter of perception.

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